samedi 13 novembre 2010

Jour 4 - Quit you life - Park Nou-sik (FFCF 2010 - Classic)

Sans Congo à Joy Means Sick : "toi t'as raté une petite perle mon con ! Connais-tu Park, Park Nou-sik ? Tu peux commencer à préparer ton jeu de jambes, ce sera lui dorénavant notre référence"

Quit your life, Park Nou-sik.

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Park Nou-sik c’est un mec à l’ancienne, la crème de la crème. Débonnaire, bedonnant, grave et insouciant à la fois, Park Nou-sik est au service d’une certaine idée du chic type. Grand mec classe et élégant, large du coffre, petit foulard de dandy, vestespiccadilly circus, moustache princière et lunettes de pop star, Park Nou-sik est tiré à quatre épingles entre castagnes, drague, vengeance et bowling. Park Nou-sik, c’est la griffe de l’homme : c’est ce vers quoi la gente masculine, consciemment ou inconsciemment, désire tendre. Park Nou-sik est le métronome du style. On ne déconne pas avec Park Nou-sik. M. Park, c’est tout simplement plus de 900 films en tant qu’acteur, tant et si bien qu’on le surnomme « l’homme aux mille visages ». En 1971, M. Park Nou-sik prend la caméra pour réaliser son premier film, Quit your life, dans lequel le premier rôle revient à … M. Park Nou-sik. Du sur mesure pour M. Park : sortez les Berluti.

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Cheol-ho (Park Nou-sik) et son ami Jeong-su travaillent dans une mine d’or en Mandchourie. Ils se font piéger par Dal-gyu, qui assassine un notable local et témoigne contre les deux compagnons. Les deux sont arrêtés et Jeong-su est condamné à mort par pendaison. 12 ans plus tard, Dal-gyu est devenu un gros ponte capitaliste qui souffre furieusement de visions de cordes à nœud coulissant. Cheol-ho sort des méandres de l’oubli pour se rappeler à son bon souvenir : il lui demande de se suicider pour venger la mort de son ami. Entre temps, il était allé rejoindre Young-suk, la femme aveugle de Jeong-su, en se faisant passer pour ce dernier. Grand seigneur : il reprend l’entretien de cette femme à son compte, et se pose sérieusement la question de lui offrir ses cornées pour qu’elle retrouve la vue – depuis The Man from Nowhere, on trouve ces transactions forcément suspectes, mais enfin bon, PNS est trop magnanime. PNS est le mec le plus classe du monde.

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Après le film, c’est 65 % de mélo et 35 % de baston. Comme il fallait s’y attendre, être l’acteur le plus paf-paf d’Asie n’est pas suffisant : PNS est également un réalisateur très sympa. J’abandonne les pincettes du retro-kitsch pour avancer très sérieusement que la réalisation est vraiment fun. Il y a quelques transitions couillues audacieuses (cf. la petite qui a son doigt dans la bouche), le montage est souvent rythmé et entraînant, et il semble évident que PNS s’est beaucoup amusé dans certaines prises de vues (genre la caméra qui tourne dans tous les sens histoire de). Mais PNS ne s’arrête pas là, il se met en scène. Pour ce qui est de la fight, au-delà d’un centre de gravité probablement un peu trop haut, PNS régale : généreux comme un daron, lourd comme un rubgbyman, il reste dans le feutré et classique. A noter toutefois qu’il prend à un moment de l’élan pour faire une roue-kickéedévastatrice qui renverrait les gymnastes biélorusses à leurs chères études. Dans le même ordre d’idées, PNS a les idées fixes : s’il a décidé que Dal-gyu mourra par pendaison, ce n’est pas pour le canarder de plomb à la première occasion venue ; en témoigne la course poursuite finale, qui répond largement aux standards de l’époque et préfigure étrangement une course poursuite similaire d’un 007 de 1981, For Your Eyes Only (celui avec Carole Bouquet). PNS parvient à faire remonter sa voiture à la hauteur de celle de Dal-gyu et réussit (mais tout le monde sait que MNS ne « réussit » pas, il fait) à passer la corde au cou de Dal-gyu pour l’étrangler. Franchement bogosse.

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On notera également que Quit your life annonce d’une certaine manière le développement d’une consommation de masse en Corée du Sud, qui transparaît dans le cinéma plutôt vers les années 80. En plus d’avoir le don d’ubiquité, PNS est donc visionnaire. Le passage du film est mythique, il s’agit du moment où PNS fait visiter à la femme aveugle son nouvel appartement : il feuillette les plans de son film comme les pages d’un catalogue La Redoute. On a : la table basse et les fauteuils, le téléphone, les belles armoires, le miroir pour se maquiller (première vanne de PNS), une armoire pour ranger tout plein de choses, et enfin, dernière vanne de PNS : une télévision ! La femme se met à pleurer, PNS se rend compte de sa boulette. Oui, il arrive à PNS de n’être qu’un homme, comme vous ; un peu limité, un peu faible.

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Le final est grandiose ; PNS ne veut pas quitter la scène, il met donc du temps à mourir, à l’instar de la parodie de Godard dans Une Bande à part (de toute manière, PNS bat la mesure du temps). La femme de son pote le cherche, mais comme ils sont dans la cambrousse et qu’elle est aveugle, c’est beaucoup plus compliqué. No problema, PNS active son pouvoir télépathique pour tchatcher la meuf durant ses derniers instants : où il lui avoue qu’il veut lui donner ses yeux et qu’il n’est pas son mari. Elle le savait déjà, qu’elle lui répond (toujours en télépathie pure). A la fin, ils se frôlent sans se voir, le film s’achève sur la « reconnaissance de don d’organe » que PNS tient à la main. Du mélo brut pour les truands.

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Bref, Quit your life est un film super sympa, et pas seulement au second degré. En tous cas, un grand merci au Festival de m’avoir fait découvrir M. Park Nou-sik. J’ai vu en lui le père que je n’ai jamais eu.


Rédigé par Kim Bong Park

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